COMMENT S’EST CONSTITUÉ LE CARRÉ VIP

En 1992 les promoteurs de la Ligue des Champions et de la Premier League ont provoqué une nouvelle économie du foot. 25 ans plus tard, les bilans indiquent que les effets recherchés ont été atteints. Avec une hiérarchie sportive et financière plus homogène et désormais plus resserrée (passage d’un Top 5 à un Top 4 des grands championnats, sans la L1). Illustration avec les données compilées ici.


 

1992 vs 2017 en chiffres

Classement UEFA (pays) 1992 vs 2017  compétitions interclubs (sur cinq ans)

 

 

 

 

 

 

 

 

En 1992, la hiérarchie européenne des pays est marquée par l’interdiction faite aux clubs Anglais de participer aux Coupes d’Europe en 1985 après la catastrophe du Heysel. De retour progressivement à partir de 1990, ils n’ont de ce fait marqué de ce fait aucun point à ce classement pendant cinq ans. D’où la treizième place de l’Angleterre en 1992 alors qu’elle était première en 1985. Elle est deuxième en 2017 et très largement en tête pour la saison en cours.

Pour le reste, la hiérarchie est restée globalement stable en 25 ans dans le top 10, avec sept pays toujours présents (Italie, Allemagne, Espagne, Belgique, France, Russie, Portugal) et quatre pays sur cinq toujours dans le Top 5: Italie, Allemagne, Espagne, France.

Classement UEFA (clubs) 1992 vs 2017  compétitions interclubs (sur cinq ans)

Explication de la décision de créer la Ligue des Champions, plus élitiste, avec le classement 1992: une hiérarchie diluée avec des intrus, économiquement (Etoile Rouge, Anderlecht, Malines, Steaua Bucarest. En 2017, tout est rentré dans l’ordre. Depuis 2012, les vainqueurs des douze finales européennes (Ligue des Champions et Ligue Europa) proviennent de trois championnats: Liga (8 victoires); Premier League (3 victoires); Bundesliga (1 victoire)

Et depuis 2012, le Top 4 décidé par l’UEFA à partir de la saison prochaine en LDC  est déjà en place: La Liga, la Bundesliga, la Série A et la Premier League ont fourni les douze participants aux finales de la Ligue des Champions, avec sept clubs: Real Madrid, Atletico Madrid, Juventus, Bayern, Barça, Borussia Dortmund et Chelsea.

Droits télés 1991/92 vs 2017/18 Top 5 championnats

 

 

 

 

 

 

Les droits télés sont le moteur espéré par les inspirateurs et créateurs de la Ligue des Champions et de la Premier League. Bingo pour les deux compétitions. La multiplication des chaînes, en clair, cryptées, en hertzien, satellite, câble, fibre provoque une concurrence qui s’élargit même encore plus aujourd’hui avec les géants du web, le GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon).

La Série A, la plus habile à vendre ses droits en 1992, a rétrogradé aujourd’hui à la quatrième place. La Premier League rafle la mise devant un trio groupé (Bundesliga, Liga, Série A), la Ligue 1 fermant la marche.

Recettes 1995/96 vs 2015/16 Top 5 championnats

 

 

 

 

 

L’inflation des recettes espérée en 1992 par les tenants du foot business s’appuyait, outre les droits télés, sur le marketing et les sponsors.  Les données financières disponibles pour le Top 5 ne concernent que la période 1995/96 vs 2015/2016. Mais la tendance globale  est là. Grande réussite, toujours, à commencer pour la locomotive Premier League. Là aussi la Série A, en pointe au milieu des années 90, a perdu du terrain. Du fait en particulier du dynamisme de la Bundesliga, très structurée dans l’équilibre de répartition des recettes.  La Ligue 1, qui partait de très loin, recolle au peloton. Mais elle est très loin du modèle allemand en termes de prospérité.

Moyenne des spectateurs 1991/92 vs 2017/18 Top 5 championnats

 

 

 

 

 

 

 

Si les recettes guichets ont largement baissé en pourcentage, elles restent toutefois essentielles aux budgets des clubs. En Angleterre, début 1990 le rapport Taylor, suite à la tragédie d’Hillsborough, sonne la fin de l’atmosphère des vieux stades anglais, comme Highbury, racontée ici par Nick Hornby, supporter d’Arsenal. Les autorités anglaises suivent le juge Taylor sur le volet sécurité, mais pas sur sa recommandation de maintenir des tarifs modérés dans les stades. L’augmentation du prix des places chasse le public populaire, ce qui est raccord avec l’image voulue lisse des marques Premier League et Ligue des Champions. Les clubs anglais investissent massivement pour de nouveaux stades, ceci suivi d’un afflux de spectateurs (21.860 de moyenne en 1992, 38.245 actuellement).

Mais c’est la Bundesliga qui mène et réussit la politique la plus spectaculaire dans ce domaine, avec pas loin du double de spectateurs en plus sur 25 ans. Stades modernes (en particulier à l’occasion de la Coupe du monde 2006), prix bas, places debout, animations laissées aux supporters, une vraie réussite.

La Liga maintient globalement son taux d’affluence tandis que la Série A paye depuis des années pêle mêle la vétusté de ses stades, la violence, l’infernale complexité de la carte de supporter pour les déplacements (enfin supprimée), le manque d’animation et d’ambiance.

La Ligue 1 a elle doublé son affluence moyenne en 25 ans mais les stades construits ou rénovés pour l’Euro 2016 se montrent quasiment tous largement surdimensionnés.

L’inflation des salaires des joueurs en Angleterre

 

 

 

 

 

L’inflation des salaires des joueurs est à la fois la cause et la conséquence de la course permanente des clubs pour plus de recettes. Pour ses données disponibles et son rôle moteur, l’Angleterre constitue le meilleur indicateur dans ce domaine. Avec les précieuses données du site Sporting Intelligence de Nick Harris. Comme l’évolution du salaire hebdomadaire des joueurs depuis 1964. Et, encore plus complet, le tableau des salaires annuels moyens des joueurs des quatre divisions pros depuis 1984. Assorti du comparatif avec le salaire moyen annuel des salariés.

Mais cette inflation ne concerne qu’une minorité de joueurs comme le rappelle Pierre Rondeau, économiste du sport. FIFpro, le syndicat international des joueurs pros affiche sur son site officiel une cette autre réalité occultée, en particulier en Afrique.