UN MERCATO CHARNIÈRE
A quelques jours de sa clôture, l’édition 2015 est déjà marquée par l’approche des méga-droits télés anglais en 2016, tout comme ceux en nette augmentation en Italie, également par la fin du TPO. La Premier League vampirise cette année le marché avec de nouveaux acteurs, des clubs de second niveau, mais aux revenus suffisants pour piller la L1. Le Portugal liquide chèrement ses joueurs sous régime TPO, tandis qu’en Série A, les grands clubs dépensent déjà allègrement les droist télés de 2016.
La L1 ? Elle vit déjà une nouvelle époque avec le circuit court entre clubs de second niveau, anglais et français. Il y a deux ans Lemina et Imbula sont allés à l’OM pour 4 et 7 M€. Cette année, Kanté et Amavi sont partis à Leicester et Aston Villa pour 9 et 13 M€. Une aubaine pour les clubs de second niveau en L1, une nouvelle politique à définir pour les candidats à l’Europe.
(Bilan provisoire établi le 26 août)
Ligue 1-Angleterre en direct
Dans ce mercato 2015, la France illustre parfaitement le gouffre qui commence à s’installer entre la Premier League et le reste du monde. Cet été, onze joueurs de L1 ont été transférés pour au total 127 M€ dans le championnat anglais. Pas un seul dans un des cinq clubs dominants de la Premier League (Manchester United, Manchester City, Chelsea, Arsenal et Liverpool).
Avec ces 127 M€ d’investissement, les clubs hors Top 5 de la Premier League sont de loin les plus gros acheteurs de joueurs de L1 (devant le marché interne à 53,6 M€). Ce circuit court constitue une nouvelle donne pour deux catégories de clubs en L1. Les clubs formateurs et de second niveau sont directement bénéficiaires de la manne de Premier League. Les clubs candidats à l’Europe et qui pratiquent le trading de joueurs comme l’OM sont confrontés à ce constat.
Cet été, des joueurs comme Gueye, Kanté, Amavi, Veretout sont allés directement à la case Premier League sans passer par eux. D’où la nécessité d’une autre politique. Lyon s’appuie depuis plusieurs années sur son centre de formation. L’OM vise encore plus cet été les prêts de la part des grands clubs en complément de sa politique d’intéressement à la revente,.
Dans ce mercato 2015, la L1 est dans le peloton des championnats « raisonnables », même si Jorge Mendes en est un grand animateur, à Paris avec Di Maria et à Monaco et que Marseille a fait un gros turn over.
La L1 a pour l’instant dépensé 291 M€ en transferts devant la Bundesliga (289 M€) et la Liga NOS (274 M€). La Bundelsiga a une faible balance négative (-34 M€), tandis que celle de la L1 est positive (+ 55 M€). Celle de la Liga l’est aussi, mais d’un montant historique (+216 M€, le double du précédent déjà inédit) en raison de la fin du TPO (voir plus loin).
La Premier League dépense sans compter
Il y a un an les Top clubs anglais étaient tous dans les huit plus gros acheteurs de l’été. Pour l’instant ils ne sont plus que trois (Manchester City, Liverpool et Manchester United). Mais les clubs de second niveau de Premier League n’ont jamais été aussi nombreux dans les vingt cinq plus gros dépensiers de l’été. Soit Newcastle, Aston Villa, Tottenham, Leicester, Southampton, Sunderland, West Bromwich Albion.
Une présence permise par leur dotation en droits télés : 107 M€ en moyenne, qui passera à 168 M€ à partir de 2016/2017. Les Anglais se régalent donc comme des fous dans ce mercato. Cap vers le milliard d’euros d’achats et les 500 M€ de balance négative.
Fuite en avant en Série A
En 2016, les droits télés de la Série A vont passer à 1, 2 milliard d’euros par an (550 M€ de plus que la L1 l’an prochain). Ce qui provoque dès cet été une frénésie sur le marché (+ 60 % d’augmentation des ventes et des achats).
Les « gros » ont beaucoup acheté (116 M pour la Juventus, 87 M€ pour Milan, 63 M€ pour l’Inter), une course en avant dans un contexte rappelé par Marco Bellinazzo (Il Sole 24 ore du 23/8) : les clubs de Série A cumulent 3,7 milliards de dettes et l’âge moyen de leurs stades est de soixante ans).
Le Portugal liquide le TPO
274 M€ de ventes, 58 M€ d’achats, soit 216 M€ de balance positive, la Liga Nos et en particulier Porto et Benfica font le ménage dans leurs comptes. Du fait de l’interdiction du TPO depuis le 1er mai, les clubs portugais ne peuvent plus détenir des joueurs en co-propriété. D’où une opération de ventes inédites dans le championnat portugais. Porto et Benfica sont en effet dans le top 3 des plus gros vendeurs de l’été. Porto en première position (118 M€), Benfica en troisième (92, 2 M€). Un total qui représente 72 % des ventes de cet été en Liga NOS.
Ces deux clubs vont devoir eux aussi trouver un nouveau logiciel. La formation, un des grands atouts du football portugais selon Nicolas Vilas, spécialiste de la Liga Nos ?
L’Atletico Madrid est (toujours) un hall de gare
Terrain d’expression privilégié à la fois de Jorge Mendes et Doyen Sports, le club madrilène est tous les ans un grand acteur du marché et cet été encore. Avec 126 M€ d’achats, l’Atletico Madrid arrive second au classement des plus dépensiers derrière Manchester City (128, 8 M€). En vendant pour 96 M€ (le deuxième meilleur total derrière Porto), le club madrilène est donc déficitaire de 30 M€ pour l’instant dans ce mercato. L’Atletico Madrid cumule 369, 3 M€ de dettes, le plus grand montant du football espagnol. Et il cumule donc aussi tous les travers du foot business (déficit, valse de joueurs, commissions en pagaille).
Et c’est toujours Jorge Mendes qui gagne à la fin
Dans un mercato où la promesse des droits télés anglais et italiens augmente le volume des transactions et où la fin du TPO provoque une inflation artificielle des transferts, Jorge Mendes est comme toujours celui qui relève les compteurs à la fin de sa tournée.
Elle l’a conduit à Porto, Benfica, Madrid (Real et Atletico), Valence, Monaco, Chelsea, Manchester (United et City) et au Paris SG. Dans la dernière ligne droite, il lui reste surtout à trouver la fin du feuilleton De Gea (Manchester United) au Real Madrid. Ou pas.
Ce qui l’approcherait des 350 M€ de tractations cet été. Une bonne cuvée puisqu’en homme très organisé, il a trouvé le temps de se marier début août, en présence de ses meilleurs clients bien sûr.